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Artistes 2017
Par-delà l’écume des jours
“L’homme qui n’est pas content de Peu n’est content de rien.“
Épicure
À l’heure où l’atypique invasion artistique du village de Bonson se renouvelle pour la quinzième fois, le temps d’une radieuse quinzaine de début d’été au cours de laquelle s’échangent moments de convivialité et fulgurances de création, on peut se demander ce qui sédimente ici, ce qui imprime là, avec le temps et la récurrence des actions. Car ce dont nous sommes sûrs, c’est qu’un esprit persiste et que, même lorsqu’on aura tout oublié des festivités, il devra forcément en rester “un peu quelque chose“… Dans une volonté de marquer une coïncidence entre la forme et le fond, il nous a donc semblé pertinent d’aborder dans cette exposition jalon du 15ème Festival du Peu les thèmes de l’empreinte et de l’identité à travers quelques gestes, traces et autres signes contemporains porteurs de réflexions.
Mêlant les générations et les préoccupations artistiques, ce parcours, qui peut s’apparenter à un échange de points de vue, témoigne de la permanence des questions liées à la signification de l’œuvre d’art et des différences possibles quant à sa perception. Les artistes traquent volontiers les signes, s’emparent de traces et les recyclent dans une œuvre qui apparaît alors comme une transcription recomposée d’une réalité, tout en portant la marque unique de son créateur. Or, les attitudes ne sont pas toutes similaires : certaines pratiques, répétitives, systématiques parfois jusqu’à l’obsession, peuvent laisser une empreinte à la manière du processus naturel de l’érosion ; d’autres, par la rencontre, l’adaptation au lieu et aux gens, veulent creuser l’identité d’un territoire, d’une population.
Un nœud de conflit intéressant peut aussi se détecter dans la confrontation entre une manifestation dont l’une des ambitions affichées est de créer du lien social, et les démarches généralement individualistes propres à la nature des artistes. Ainsi, il est significatif que, pour cette édition, le partage se traduise dans certains cas par des associations d’artistes, ad hoc ou pérennes, avec la mise en commun de procédés ou d’éléments de création “à quatre mains“, en complément de l’expression individuelle de chacun.
Dans l’espace public comme dans les salles dédiées, les propositions de 2017 font la part belle à la recherche pure ou s’épanouissent dans la tentation esthétique, obéissant à des logiques rigoureuses sans exclure un esprit plus ouvertement ludique. La variété des disciplines abordées et des moyens utilisés reflète cette ouverture : le design, le verre, le graff, la peinture, la photographie, le dessin, la sculpture, l’installation, la vidéo sont en effet les terrains labourés par Philippe Bresson, Izabela Dziepak, Faben, Alberte Garibbo, Jacques Godard, Stéphanie Hamel Grain, Hala Hilmi Hodeib, LODH’ (Hervé Demongeot & Laurent Brachelente), Valérie Morraja, Jean-Louis Paquelin, César Piette, Isabelle Poilprez, Florian Schönerstedt, Bernard Taride, Renata Szyrocka et Monique Thibaudin.
Si ces quinze artistes invités - primo-exposants à Bonson, comme il se doit - représentent une grande diversité de profils et de tendances au sein de la création contemporaine, ils partagent pour la plupart un même ancrage territorial. Ainsi, ils vivent et ont leurs ateliers à Nice ou dans les collines et vallées voisines. Certains sont historiquement inscrits dans les mouvements dits de “l’École de Nice“, d’autres ont suivi des voies indépendantes. Ils peuvent être issus de l’école des Beaux-arts de la Villa Arson ou travailler régulièrement avec des galeries et des institutions niçoises ou plus lointaines… Au-delà des biographies et des parcours individuels, leur réunion offre aujourd’hui deux versants représentatifs d’une même réalité, celle des créateurs originaires de la région et qui en ont franchi les limites, comme celle des artistes venus d’ailleurs mais dont le destin s’est partiellement forgé ici avant de rayonner à nouveau à partir de nos rivages.
Frédérik Brandi,
Commissaire de l’exposition
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